L’Internet, censé apporter un surcroît d’autonomie aux individus, de participation aux débats et à la décision publique, semblait être le dispositif technique incarnant l’idéal de l’éthique de la discussion habermassienne en permettant une délibération démocratique éclairée (Flichy, 2008).
Au fil des avancées technologiques, le rapport au réseau s’est progressivement éloigné de l’écran pour investir la vie sociale, domestique, urbaine grâce au développement de l’Intelligence artificielle et aux nombreux objets connectés. L’autonomie qui avait initialement été pensée de façon quantitative et spatiale (dépassement des frontières géographiques, des limites à l’accès au savoir), a été appréhendée de façon qualitative et temporelle : il s’est agi de soulager les individus de certaines tâches, de les assister dans leur vie et dans leurs choix au point que l’on parle volontiers aujourd’hui d’ «accompagnement algorithmique de la vie » (Sadin, 2015).
Si Aristote identifiait trois formes de connaissances : épistémè (les sciences), technè (la production technique) et phronesis (la prudence, l’éthique dans l’action), les deux premières formes n’ont cessé de se développer, au cours des siècles passés, mais sans lien avec la troisième. Emportées dans le tourbillon des progrès, les générations passées se sont détachées de la phronesis et les avancées technologiques, aussi grandes soient-elles, n’ont pas toujours apporté un bien être supplémentaire aux individus, et les ayant même parfois asservis. Dès lors, les réflexions croisant enjeux éthiques aux évolutions technologiques mérite une attention particulière (CNIL, Comment permettre à l’homme de garder la main ? Les enjeux éthiques des algorithmes et de l’intelligence artificielle, Synthèse du débat public animé par la CNIL dans le cadre de la mission de réflexion éthique confiée par la loi pour Une république numérique, décembre 2017).
Parallèlement, si en quelques années, un marché numérique s’est créé reposant sur un enrichissement de l’offre de produits, de services ou de contenus numériques et sur des moyens de commercialisation et plus généralement de communication, cherchant à s’affranchir des contraintes géographiques, matérielles et temporelles, l’accessibilité, la quasi-universalité et la profusion des offres sont plébiscitées par les consommateurs dont les droits et garanties ne cessent d’être renforcés. Mais d’un autre côté, cette profusion soulève des questions de régulation, de modèle de société dominé par les GAFAM ou MAMAA et sur l’effectivité des outils extraterritoriaux européens visant à réguler l’activité économique de ces géants (Digital services Act et Digital Market Act de 2022).
Entrent également dans le cadre de cette étude les modalités et contrôles de la circulation des contenus et informations qui sont de l’essence même du marché numérique mais dont l’intérêt est loin d’être nouveau en s’enracinant dans l’histoire. L’ensemble de ces réflexions est à la croisée du droit (communications électroniques, contrats, consommation, concurrence, distribution, données personnelles et histoire du droit) et des sciences de gestion (relation client, marketing digital, redéfinition du champ d’activité, recomposition du réseau d’affaire, création de valeur, appropriation et usage du numérique, sécurité numérique).
L’axe Numérique et société (NUS - Littoral Intelligent) entend conduire une réflexion critique et empirique sur la transformation de la société par le numérique (Internet, IOT, digitalisation des entreprises etc.).
L’approche couplée du management et du droit permettra d’axer une première recherche sur la gouvernance des données, thématique aujourd’hui fondamentale pour les entreprises et collectivités publiques. L’étude des stratégies managériales envisagées sous l’angle de la conformité (RGPD, Governance Data Act, Sécurité de l’information) et de la cybercriminalité (modèles économiques de l'hacking), pourra fournir aux acteurs privés comme publics des outils propices à orienter leurs décisions et politiques (ex : Colloque du 9 mars 2023 organisé à l’Université de La Rochelle sur “Le partage de données entre acteurs publics et acteurs privés”).
Une seconde recherche portera sur le marché numérique, thématique à la croisée du droit (communications électroniques, contrats, consommation, concurrence, distribution, données personnelles et histoire du droit) et des sciences de gestion (recomposition des réseaux d’affaires, création de valeur, appropriation et usages du numérique, maîtrise et contrôle des données). Les recherches conduiront à privilégier sur une première période deux axes : d’une part, la puissance des GAFAM, BATX ou MAMAA et l’effectivité des outils extraterritoriaux européens visant à réguler l’activité économique de ces géants (Digital Services Act et Digital Markets Act de 2022) et, d’autre part, les modalités et contrôles du stockage, de la sécurité ainsi que de la circulation des contenus et informations (Ex : recherches sur “la rumeur” qui réuniront historiens, privatistes, publicistes et gestionnaires).
Les recherches dans le domaine du numérique adopteront notamment une approche comparatiste et internationale, le numérique étant par définition transfrontalier.